LES
RADIOMATEURS AU CONGO avant 1960, la période de l'indépendance et l'arrêt en 1972 |
Document
publié avec l'aimable autorisation de la
Rédaction de la Revue des Radioamateurs de Bruxelles ON5UB
|
Extrait de
ON5UB news
Page d’Histoire OQ5 –
9Q5 – ON4 en 1960 Lorsque le monde du radio
amateurisme sort de sa traditionnelle discrétion,
c’est en général pour être
associé à des évènements
importants et malheureusement souvent tragiques. Catastrophes
naturelles ou humaines, surtout dans les pays à grandes
étendues. Pour appuyer ou remplacer les
moyens de communication traditionnels ou officiels, les OM mettent
alors leur station et leur compétence au service de la
société civile. Cela se passe souvent chez les
« autres », mais en juillet 1960
(aussi en 1961), la toute nouvelle
‘’République Démocratique du
Congo’’ (ex Congo Belge) connut des troubles graves
dans certaines régions. La fuite de la population vers des
zones moins dangereuses éparpilla des milliers de personnes
sur les routes africaines. Pour les familles en Belgique,
principalement, le manque d’informations augmenta
l’angoisse. Cet
article décrira
l’immense service que rendirent les radioamateurs par la mise
en place rapide d’un réseau radio efficace entre
l’Afrique et l’Europe, mais aussi entre les OQ5 qui
bien souvent servaient également de relais entre les
étapes tout en communicant ; parfois au
risque de leur vie ; les zones à
éviter, En 1958, le cycle solaire 19
était à son apogée avec un flux
solaire exceptionnel de 190 et les QSO avec l’Afrique et le
monde entier courants et nombreux suite à cette propagation
incroyable et ce fut d’ailleurs une chance énorme.
Dès le début des troubles en 1960, ce réseau radio fut rapidement opérationnel et la solidarité joua à fond entre les différents acteurs. Les stations 9Q5 (ex OQ5) parsemées dans le pays informaient les collègues ON4 du passage des familles en fuite et de leur progression. Les proches en Belgique étant prévenus téléphoniquement par les ON4. Parfois les familles se parlaient en direct, la ligne téléphonique en Belgique raccordée au TX de l’OM (Système : Phone Patch ; strictement interdit par notre réglementation). La RTT tenant compte des circonstances exceptionnelles et graves fit preuve d’une grande souplesse dans l’utilisation des ondes, des lignes téléphoniques et du genre de messages transmis par les OM.
Tout comme le paquebot mixte construit à Hoboken en 1950, le « Thysville » de la Compagnie Maritime Belge qui embarqua des réfugiés à son bord dans le port de Matadi (à 150 Km de L’Atlantique) pour les rapatrier. La radio de bord permit aux passagers de rassurer les proches en Belgique. Autre point de transmission assez particulier : la base ‘’Roi Baudouin’’ de l’expédition Antarctique Belge. Son émetteur de 1 Kw et une antenne Rhombic avec OR4BB ou OR4TX (ON4TX) comme opérateur radio et électronicien, apporta également sa contribution au réseau radio.
Copie de l'Editorial du mensuel de l'UBA: "QSO" de juillet - août 1960. Malheureusement ce document est devenu introuvable et le scan en ma possesion est de piêtre qualité, désolé pour ce désagrément. La suite à cet article détaillera par des anecdotes, des cas vécus par les OM, mais aussi par des tiers ; des conditions de trafic entre les continents tout en restant strictement dans notre domaine, celui du ‘’Radio amateurisme’’. Parmi
les OM ayant
participés au réseau d’urgence
Belgique/Congo, certains ont rejoint le monde de l’Ether
emportant leurs témoignages et leurs souvenirs,
d’autres ne sont plus radioamateurs ou alors leur
localisation est devenue difficile au fil du temps. Ayant la chance et
l’honneur de connaître des OM de
proximité et parfois du même
QRL, à savoir la Firme MBLE
(qui plus tard devint PMA :
Philips & MBLE Associeted), cette 2° partie de
l’article se concentrera sur quelques situations
particulières en n’ignorant pas le travail de
l’ensemble des OM qui contribuèrent à
cette opération de solidarité. En OQ5/9Q5
à Stanleyville En temps de paix, les contacts entre le Congo et la Belgique étaient à cette époque assurés par le téléphone, le télétype, par radio ou simplement par correspondance papier via les lignes aériennes et par bateaux. Quelques jours après l’indépendance, la nouvelle République se désorganisa politiquement, matériellement, mais surtout militairement provoquant la fuite de la population européenne ; la sécurité des gens et des biens n’étant plus assurée…. Des réseaux radio s’organisèrent pour garder le contact et suivre le déplacement des familles sur les routes. Certains réseaux issus d’initiatives privées (non officiel, mais vu les circonstances…et l’étendue du pays), d’autres comme les OQ5 bien structurés et routinés dans le trafic radioamateur s’organisèrent rapidement pour garder le contact entre eux, mais aussi avec la Belgique. Au
début
de la nouvelle République, la série
de préfixes 9O, 9P et 9Q
sera instaurée en remplacement de OQ5. Une
situation politique instable amènera les
autorités locales à suspendre le Service Amateur
dans le pays dès juillet 1972. A ‘’Stanleyville’’, actuellement Kisangani, la firme ‘’MBLE – Congo’’ assurait la vente et l’entretien de matériel Radar, de centraux PABX, de TX HF et aussi de TX en Kit pour radioamateur, similaire à la célèbre marque ‘’Heathkit’’.
C’était assez osé, tout comme quelques mois plus tard ; les hostilités ayant reprises ; emporter dans le coffre du véhicule vers l’aéroport un TX et déclarer froidement au barrage que ce n’était pas du tout un émetteur, mais un appareil de mesure…Toute une ambiance, une époque… La firme MBLE - Congo ferma ses bureaux de ‘’Stan’’ en décembre 1960. Mais
aussi… Un
cadre
du BCK
a également fait
part de quelques souvenirs. Il s’agit de ex ON5TW,
car Léon
H a remis son call depuis peu. Laissons lui la plume….
J'ai
trafiqué jour et nuit,
avec la maison mère, et avec Jurbise (RTT), pendant tout le
temps de l'indépendance du Katanga, jusqu'à
l'arrivée de l'O.N.U, et des troupes d'occupation du Bas
Congo. Cela m'a valu de goûter des plaisirs de la
prison locale, et, après de longues palabres,
d'être renvoyé en Belgique, ou j'ai
trouvé du travail à la M.B.L.E. jusqu'en 1972,
date à laquelle je suis passé chez Philips au
Mexique, pendant trois ans, puis 2 ans en Hollande, puis 4 ans au
Brésil, puis à nouveau 3 ans en Hollande. Tant
en Hollande qu'au Mexique et au
Brésil, et finalement en Belgique, j'ai toujours
été radioamateur, sous des indicatifs
différents, le dernier en date ayant
été ON5TW....’’ En ON4 (=
en Belgique, note de
ON6LF) MBLE, 80 rue des 2 Gares à Bruxelles, juillet 1960. Dans un local aménagé en station radio OM, les QSO avec l’ex Congo Belge ne sont pas aisés. Le BFR 511 de notre firme, le TX bien connu en Afrique (tropicalisé comme il se doit), ainsi que le dipôle sur le toit doivent lutter avec l’environnement (parasites électriques) de la Gare du Midi.
Cette
station était une tentative
pour soulager les vacations radio d’Alex
ON4AY.
En
vérité, QRL (travail) la journée, QSO (contacts) tard le
soir ou la nuit, les infos à
téléphoner aux familles et des
journées de seulement 24 h sont difficiles à
gérer. Nombreuses furent les personnes à venir
tirer la sonnette soit pour quémander une information, pour
donner un message vers l’Afrique ou simplement pour remercier
de visu.
Devant les difficultés d’assurer aussi le trafic via la MBLE, autorisation fut accordé par la Direction d’utiliser la station perso de l’OM au domicile durant les heures de travail. A la rue du Maquis, le RX (récepteur) "HRO 7" suivit d’un TX (émetteur) de 150 Watts + un TX "BLU en 21 MHz", tous 2 "OM made" alimentaient une Cubical Quad 2 éléments construite et montée d’urgence vu les circonstances. Précisons qu’en 1960, le haut Evere près de "Philips Service" Ch. De Louvain était très dégagé, presque pas de constructions, ni d’obstacles, ce qui avec la propagation exceptionnelle des années 1960, favorisa les QSO.
Epinglons une singularité ; l’U.M.H.K. (l’Union Minière du Haut Katanga) demanda à Alex d’acquérir et d’installer dans son Club ; Bd. Du Souverain à BXL ; une station OM opérée par des radioamateurs confirmés avec l’objectif de maintenir un contact radio avec le personnel et les installations en Afrique tant du point de vue social, que parfois concernant le QRL. Ce genre de tolérance était de mise car n’oublions pas que là bas, la désorganisation et l’insécurité étaient grandes, si pas totales. En
KB29dn…
Ne cherchez pas, c’est approximativement le World Wide Locator de la Base Roi Baudouin dans l’Antarctique (70° 25 ‘ 53’’ latitude Sud – 24° 18’ 38’’ longitude Est).
A proximité, une tour en tubes métalliques (enfoncés dans la glace en versant de l'eau chaude à l’intérieur) haute de 6 mètres érigée pour placer le radio théodolite, comportait de nombreux mâts pour les antennes (dont certains de 27 mètres de haut!). Deux antennes
Rhombic : une grande en forme de losange de 110 m de
côté et située à 27 m
au-dessus du sol, tandis que l’autre Rhombic servait
à la réception et se situait à 4 m du
sol avec lesquelles se faisait couramment du duplex avec la Belgique. Les
QSO avec Jurbise-radio en
Belgique se pratiquaient en CW et
en AM pour les communications téléphoniques. La
base était équipée d’un
transmetteur de morse automatique par bande perforée, et des
essais en RTTY se faisaient aussi régulièrement
avec le
système
Coquelet du nom d'un ingénieur des ACEC. Ce
système était utilisé à
l'armée et sur lignes, donc pas en HF. D'ailleurs les
résultats n'étaient pas très bons
à cause des distorsions dans la transmission.
En gros, les communications radio se résumaient à l’envoi de télégrammes scientifiques et familiaux, mais aussi de communications téléphoniques d’ordre familial et scientifique avec la Belgique et d’autres pays européens par l’intermédiaire du central téléphonique de la rue de la Paille à BXL. Des communications locales avec différentes bases antarctiques se faisaient quotidiennement pour l’échange de données météorologiques et scientifiques. Les contacts OM sur les fréquences IARU étaient très recherchés et c’est naturellement que ce shack participa au réseau radio de solidarité lors des ‘’évènements congolais’’ en juillet 1960. sous le call ‘’OR4BB’’. Ces quelques lignes reflètent mal l’efficacité et le dévouement de l’ensemble des OM envers la population et dont les souvenirs de cette époque se diluent et sont devenus hors de propos.Terminons
par
un extrait de
l’Editorial de ON4BK -
Président de l’UBA en
janvier 1961, traduisant bien l’ambiance
du moment : ‘’…..Au
début de cette année de 1961,
je vous: présente au nom du Conseil de l’UBA et en
mon nom propre, tous les voeux de bonheur, de santé
et de prospérité. L'année
écoulée a été une
année importante pour l'amateurisme belge, et donc
pour notre Union. Pour
la première fois nous avons pu nous mettre directement au
service du grand public, pour jouer le rôle que vous savez
dans les communications avec le Congo, lors des dramatiques
évènement de Juillet 1960…. …..En
quelques jours, une soixantaine de stations ont
été mises en action, et la liaison avec le Congo,
considérée par beaucoup comme un DX
sensationnel devint le travail de tous les jours. Le monde des
amateurs, d'abord étonné, comprit très
vite l'importance de ce trafic, et le mot d'ordre circula de
dégager le haut de la bande de 21 MHz pour faire place aux
ON4 (stations belges) et aux 9Q5 (stations belges au Congo). Les Kilowatts
américains et sud-américains nous firent place
nette, dans la très grande majorité. La
Régie des TT (RTT devenu Belgacom e tensuite Proximus) nous aida, et nous
l'aidâmes, et cette collaboration permit
à des milliers de coloniaux d'avoir de temps à
autre des nouvelles des leurs. Un
réseau de communications s'établit et permit de
maintenir le contact avec la plus grande partie du territoire
Congolais, tant que la Régie des TT l'autorisa. Lorsque le
trafic se ralentit, les autorités
décidèrent de restreindre les
tolérances admises, et réduisirent
à dix le nombre des ON4 autorisés à
poursuivre notre action. Cette réduction,
précédée par une interruption
totale de plusieurs semaines, fit malheureusement perdre
beaucoup de contacts, actuellement le black-out s'est
étendu sur une très grande partie du territoire
congolais. Cette
interruption brusque de nos services fut très vivement
ressentie dans le public, et fit ressortir leur importance d'une
façon éclatante. Tous ceux qui ont pris part
à ce travail ont connu les témoignages de
reconnaissance des personnes qu'ils ont pu aider, ce sera leur
plus belle récompense… Tous les
remerciements à ON5QC, Albert - ON5TW,
Léon - ON4AY, Alex - ON4TX,
Roger pour
les
nombreuses infos fournies et l’aide apportée
à la rédaction de cet article.
ON5VZ – Roland, le 6 juin 2006 découvrez par ce lien les premiers contacts radioamateurs avec le Congo |